13/01/2017

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Le cruel destin des membres du réseau de résistance "Oscar-Parson" au Pays de Guer-Comblessac
1943-1945

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Le parachutage

Le grand philosophe Henri Bergson a défini la mémoire comme la faculté d'oublier.

Cela doit s'appliquer ici, car s'il est un sujet qui comporte des variantes, c'est bien le parachutage.

On trouve des témoignages vraiment contradictoires sur la date, le nombre et le type d'appareils, le nom du pilote, les témoins du parachutage, etc... etc...

La date d'abord, c'était en septembre, ont dit certains, pourtant très proches dans tous les sens du terme. Cette date est reprise dans un ouvrage publié sous le titre Oscar.

Il y avait deux avions, rapporte le même ouvrage, la même affirmation est reprise par la presse lors du procès, tel autre va plus loin, ce sont des Halifax.

Certains connaissent le ou l'un des pilotes, il est venu les voir.-La nuit du parachutage, Du Bouëxic était sur le balcon de son château en compagnie de Guédia. - Il lui indiquait les opérations qui s'effectuaient sur le terrain et précisait les points de chute ajoute même "La Gestapo française en Bretagne" à la page 143 . -Un des containers est tombé sur une maison, - un autre n'a jamais été retrouvé et doit toujours être dans le bois...

N'est-ce pas ainsi que naissent les légendes ?

En fait, les renseignements reçus du Foreign Office, et les pièces du procès, que nous avons pu consulter grâce à une dérogation qui nous a été accordée par le Ministère des Affaires Culturelles, nous permettent d'affirmer que les choses se sont passées bien différemment.

Le 20 octobre au matin, M. Du Bouexic, qui a trouvé dans le journal Ouest-Éclair, une annonce de vélomoteur à vendre à Bazouge-du-Désert, profite qu'il doit se rendre chez le notaire d'Isigny-le-Buat dans le département de la Manche, afin de toucher ses fermages, pour se rendre à Rennes par le T.I.V.. De là, il prend la micheline pour Fougères où il arrive vers 21 h.
Il couche à Fougères, prend le car le 21 au matin vers St Hilaire-du-Harcouët, et s'arrête à Bazouge-du-Désert vers les 9 h 30.
Il achète le vélomoteur de M. Vallé, et repart vers Isigny et ses fermes de Mongothier. Ne trouvant pas de chambre à l'hôtel, il couche chez son notaire, Me Lemelle. Le 22, il arrête ses comptes avec le notaire, et repart en vélomoteur en début d'après midi.
Il arrive à Guer dans la soirée, et c'est alors qu'il apprend que le parachutage a eu lieu et que tout s'est à peu près bien passé.
Après le départ de son mari, le 20 octobre, Mme Du Bouéxic, en cours d'après midi, reçoit par téléphone le message suivant " Les engrais arrivent dans la soirée". ( 6 )

C'est Ch. Touzet père, qui lui transmet ce message, charge à elle de le répercuter sur Jean Lerat. Elle s'y précipite, et n'est pas peu surprise, à son retour d'entendre Guédia lui dire :
"Alors les engrais arrivent ce soir ? Vous parlez d'une heure pour livrer" Elle se contente de sourire sans plus se soucier. (Selon Madame LERAT, c'est Philomène Dauré qui a été chargée de venir avertir Jean Lerat)
Il existe un petit contentieux sur la teneur du message.

En effet, Charles Touzet fils affirme que le message reçu de Londres était: "La vengeance approche, le châtiment suit le crime." répété 3 fois dans la journée. (7)

Au reçu de ce message son père l'a envoyé avertir Du Bouëxic et les autres de la ville. Madame Du Bouëxic lui a répondu que Monsieur était à Rennes et ne serait pas là le soir.

Il est donc probable que Ch Touzet père ait alors adressé un message convenu d'avance au château pour prévenir le groupe de Jean Lerat.

Il fait un temps épouvantable, cette nuit là, pluie, bourrasques de vent, nuages bas, tout ce qu'il faut pour cacher le sol aux aviateurs.

Selon M. Prosper Primault, certains résistants de la ville se sont réunis chez Hervé pour attendre l'heure, puis ils sont sortis par une porte de derrière et ont gagné le terrain par les sentiers qui descendent vers Payen. Ils étaient accompagnés d'un officier du nom de René Bichelot, qui avait mission d'effectuer les signaux de reconnaissance vers l'avion.

D'autres ont rejoint individuellement les points de rassemblement mais tous se sont mis à l'abri de la pluie sous le lavoir du Pont St Melaine, ou dans le moulin du Chatelier et attendent les premiers ronronnements pour baliser la "dropping zone". (zone de largage)

L'Halifax immatriculé JA-J73-S parti à 23 h 22 (heure anglaise) du terrain de Tempsford, près de Cambridge, arrive sur site à 1h 22. Il fait plusieurs passages à basse altitude pour repérer les signaux de reconnaissance et de balisage.

L'équipage est ainsi composé :

Captain                    :S/Ldr Laurie Pitt
Copilote                    :F/Lt Brians Mill
Navigateur               :Sgt Staward et F/0 Wickson
Opérateur radio       :W/0 Sauvageau
Mitrailleur de queue : SgtJackson
Largueur                 :Sgt Hill
Mitrailleur avant      :Sgt Silverwood
et mécanicien

La mission de " Parson 8 circuit" (la tournée pastorale N' 8) s'exécute comme prévue.
L'avion (et non pas les avions) arrivé sur zone à 1 h 22 (heure anglaise) 2 h 22 (heure française), y effectue ses parachutages jusqu'à 2 h 25. L'appareil retouche le sol anglais à 5 h 14.20 -

(Ces précisions peuvent être vérifiées sur les copies du plan de vol qui nous a été communiqué par le Foreign Office et dont les fac-similés sont reproduits en annexes.)

L'équipe de ramassage des containers, composée de Touzet père et fils, Hervé, Seroux, Dugue, Paistel, Landais, Durandière, Lerat Jean et Lerat Donatien, Daniel, Loeillet, Éon, Primault et Bichelot s'active sur le terrain, car un container s'est ouvert et a répandu son contenu sur le sol, un autre est tombé devant la porte de la ferme voisine d 'Étienne Éon, causant une grande frayeur à la famille Flageul.
Enfin un dernier s'est égaré et la nuit noire ne permet pas de le récupérer.
Les 11 containers pleins et les armes du container ouvert sont enfouis dans la cache qui est refermée aussitôt et camouflée sous un tas de fumier. Qui est allé récupérer le container tombé devant la porte de M. Flageul ? Touzet ou Bichelot ? Toujours est-il que le pauvre homme a eu bien peur et qu'il s'est retrouvé malgré lui au cœur du problème.

Au lever du jour, (et non pas en début d'après-midi) l'équipe se disperse sans passer par le château, comme l'indiquent certains. En début d'après midi, Étienne Éon va chez Flageul lui demander son aide pour retrouver le container perdu. Ils le retrouvent effectivement dans le bois, et comme la cache est refermée, ils l'enterrent dans un terrier de renard. Il y restera bien longtemps après les premières arrestations. Certains même, croient qu'il y est encore.

Gaston Lanoë, jeune boucher à l'époque, vivait chez ses parents, derrière le calvaire, au bourg de Comblessac. Il raconte :

" Un soir du mois de juillet ou d'août 1944, le père Louis Éon vint me demander : "Que fais-tu demain matin ? J’aurais besoin de toi au lever du jour. Tu couches la haut ? Je sifflerai doucement. "Le lendemain, très tôt, j'ai entendu siffler. Par la fenêtre, j'ai reconnu le père Louis qui avait un sac en jute roulé sous son bras. Je suis descendu et il m'a demandé de prendre un pic à tranche. Je lui ai demandé : " pour quoi faire ?" Il m'a répondu : " tu verras bien". J'ai donc pris l'outil et je l'ai suivi. On est allé directement à la traverse, dans le bois du Bois - Jan. J'ai creusé où il m'a dit, c'était un terrier de renard et j'ai retiré un cylindre métallique. On l'a ouvert, il y avait 3 mitraillettes et des paquets de cartouches enveloppées dans une sorte de plastique. On a tout mis dans le sac en jute et on est rentré. Je les ai données à Justeau du moulin de St-Séglin, quand j'étais cuistot des FFI à Maure. Il avait promis de me doter d'un revolver en échange, mais il a dû oublier. J'aurais peut - être aussi bien fait de les garder en souvenir."
Il a été beaucoup brodé autour de ce parachutage. Certains affirment que l'équipe de réception est allée se restaurer chez le comte Du Bouëxic, que celui-ci était sur sa terrasse en compagnie de Guédia pendant le parachutage, lui montrant les points de chute, que les résistants avaient trouvé des cigarettes et sentaient le tabac blond. Il a encore été dit et le bruit en court toujours, qu'un container contenait une grosse somme d'argent qui a disparu. Tout le monde n'est pas d'accord sur le nombre de containers, certains en ont compté 17.

En fait, 14 parachutes ont été largués, 13 containers et un lest pour donner la direction et la force du vent. (cf le document marqué, Page 003, Load dropped dans la ligne Parson 8)

Aucun des témoins entendus ne se souvient avoir trouvé des cigarettes, d'ailleurs eût-il fallu que ce fût dans le seul container qui s'est ouvert et dont le contenu a été dispersé sur le terrain.
Pour l'argent, c'est la même chose. Aucun container n'a été ouvert sauf celui pendant le largage, l'inventaire devait avoir lieu après la Toussaint.

Quant à Du Bouëxic sur sa terrasse, il est prouvé qu'il se trouvait alors à 150 km de là, chez son notaire d'Isigny-le-Buat. Le 27 octobre au matin, tout semble calme dans le secteur. M. Becker, garagiste à Guer, lui ayant conseillé de faire réaléser le moteur d'un vélomoteur en panne, Monsieur Du Bouëxic part pour Rennes. Lorsqu'il revient le 27 au soir, c'est pour apprendre que son vélomoteur neuf et Guédia ont disparu. Un message laissé par Guédia à l'intention de Mme Du Bouëxic est ainsi rédigé :" Soyez sans aucune crainte, j'exécute les directives de Monsieur.. Ne m'attendez pas avant ce soir, je rentre avec lui. Excusez-moi de ne pas vous avoir prévenue, mais c'était nécessaire. Alors, ne vous en faites pas, on les aura !"

Furieux, Du Bouëxic va dans la chambre de Guédia, trouve une lettre de sa femme qui lui apprend qu'elle attend la visite de son mari. Dès le 28, après avoir averti Becker du vol de son vélomoteur par Guédia, Du Bouëxic part à Paris. Il se rend au domicile de Mme Guédia le 29. Celle-ci lui fait part de la visite de son mari mais ne peut lui dire où il est parti. Il reprend son vélomoteur et avant de prendre le chemin du retour, il téléphone à sa femme pour la rassurer et lui faire part de la récupération de son bien. Mais s u r p r i s e ! Ce n'est pas sa femme qui décroche, c'est Philomène Doré. Entourée de plusieurs Allemands dont l'un a pris l'écouteur, elle répond qu'elle est seule avec sa jeune fille Diane âgée de 14 ans.

A la question de savoir s'il est prudent de rentrer, elle répond par des toussotements qui lui mettent la puce à l'oreille. Il raccroche, attend quelques instants et sonne de nouveau. C'est un Allemand qui est au bout du fil. Les renseignements qu'il obtient d'un ami de Rennes le décide à rester à Paris.

Après le départ de son patron, le 27 au matin, Guédia n'a pas perdu son temps, il a aussitôt enfourché le vélomoteur neuf de M. Du Bouëxic et est parti vers Paris, après avoir laissé un message à Mme Du Bouëxic qui croit ainsi qu'il est parti exécuter une mission secrète sur ordre de son mari et ne soupçonne rien. Par crainte de rencontrer son patron, il évite Rennes et rejoint Le Mans, par Bain de Bretagne, Chateaubriant. Arrivé à Paris il va voir sa femme et ses beaux-parents à la porte desquels il abandonne le vélomoteur, puis il se rend au siège du Francisme rendre compte de sa mission. Son chef lui conseille de rejoindre la Gestapo de Rennes. C'est en camion allemand qu'il s'y rend. (Guédia nous a dit que c'est en traction qu'il a fait le voyage.)

( 6 ) Sur ce point, Guédia n'a plus de mémoire

( 7 ) Mme Du Bouëxic affirme que le message " Les engrais ... etc " était celui de la radio.

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