Le cruel destin des membres du réseau de résistance "Oscar-Parson" au Pays de Guer-Comblessac
1943-1945
Et lui, Georges Guédia (Audigé)
Dans le but de clarifier certains points de cette dramatique histoire, nous avons essayé de retrouver celui par qui le malheur avait frappé tant de familles.
En mai 1998, grâce l'aide d'un vieux copain de régiment, Georges Champagne, j'ai eu la quasi certitude que notre homme était toujours vivant. Cette nouvelle nous a donné une ardeur accrue et finalement, après bien des recherches, grâce encore à une relation dont je tairai le nom, car il habite le voisinage de celui que nous voulions trouver, vers la mi-décembre, je me suis permis de téléphoner à ce Georges Guédia, et j'ai eu ainsi la certitude de sa localisation.
A sa demande, nous avons laissé passer les fêtes de fin d'année, et dès le mardi 5 janvier, j'ai obtenu un rendez-vous pour le jeudi suivant. René Barre et moi-même, nous sommes donc rendus au domicile de ce monsieur qui nous a reçus courtoisement, mais seul, ayant préalablement demandé à son épouse actuelle de s'éloigner. En préambule, il nous a fait part de la connaissance qu'il a de ses droits, ce que nous savions déjà évidemment. D'autre part, il nous a confié que seul, un de ses fils était au courant de son passé et qu'il n'entendait pas que son nom soit divulgué dans ce livret. Je me suis engagé dans cette voie et c'est la raison pour laquelle, il apparaît sous son anagramme.
Que dire de cet individu ? Lanalyse de René et la mienne se rejoignent en tous points.
Il est resté la copie conforme de ce qu'il apparaissait être il y a cinquante ans passés, d'apparence bonhomme, sachant se dominer pour offrir une image de sérénité. En une heure et demi, il n'a montré de fébrilité qu' à un seul moment au travers d'une cigarette fumée nerveusement. Son discours peut se résumer à ceci : " Vous savez, moi, je ne suis pas méchant, jamais je n'ai frappé personne. " Lorsqu'on lui rappelle que, sur le secteur de Guer et Comblessac, ce sont 35 personnes qui ont été emprisonnées et que onze d'entre elles sont mortes en camps de concentration, il répond avec calme : " Ce n'est pas moi qui les ai envoyés en camp de concentration....... moi, on m'avait dit qu'ils resteraient en prison en France. "
Ayant eu sous les yeux, pour identification des sigles CA et SC, la liste des prisonniers en partance de Rennes vers Compiègne le 29 juin 1944, et parmi lesquels on peut trouver son homonyme complet ( prénom et nom ) il a, avec le même sang-froid, tenté de nous faire croire qu'il s'agissait de lui, et comme je lui demandais son numéro de déportation, il m'a répliqué sans hésitation " 36666, c'est un numéro assez long car c'était assez tard " Malheureusement pour lui, j'avais consulté, auprès de M. Bernard Lesage, de Rennes, le répertoire des déportés de Neuengamme, et connaissais ainsi la date de naissance de son homonyme. A partir de ce moment, il n'est pas revenu sur le sujet.
Concernant la connivence de sa femme Edith Thaelier et de son amie Annick D.G., il a été formé. " Non ces deux femmes n étaient pas au courant de mes activités avant l'épisode du Manoir St Gurval. Si, d'ailleurs, Madame Guédia est effectivement venue en novembre 1943 au manoir, c'est parce que je l'ai fait chercher. Elle ne voulait pas venir, et à compter de ce moment-là elle ne voulait plus me voir "
Vrai ou faux ? .... pour en être sûr, il faudrait pouvoir rencontrer ces deux dames ou au moins l'une d'entre elles.
Qui sait ? Il y a de ces rencontres parfois !
Quelles étaient ses motivations ?
C'était par conviction personnelle.
Partant du principe que les soldats allemands occupés à traquer les maquisards manquaient sur le front de l'Est pour lutter contre les Russes, son action avait pour but de libérer des troupes à l'Ouest pour renforcer le front de l'Est "En effet, dit-il, je n'aimais pas spécialement les Allemands, mais j'étais et je suis toujours anticommuniste, par conséquent, tout ce qui pouvait combattre le communisme avait mes faveurs. "
Pour ce qui concerne plus particulièrement le secteur de Guer / Comblessac, il nous a déclaré qu'en fait, la formation d'un groupe de résistants était connue et que sa mission était de l'infiltrer. Il a saisi l'opportunité offerte par le fait que son épouse travaillait avec quelqu'un du coin, pour se faire présenter, mais de toute façon, il serait venu dans le secteur repérer les agents et ce qu'ils préparaient.
A la question de savoir comment il a pu venir à Redon et se trouver sur le quai alors qu'il ne s'était pas présenté à la gare Montparnasse comme convenu, il a souri.
" Voyageant avec un bon de transport, il ne m'était pas possible d'accompagner M. Morice. Au premier contrôle, j'aurais été grille. "Pourquoi n'a-t-il pas poursuivi les fermiers de Trégouidan qui cachaient des réfractaires ?
" Ce n 'était pas ma mission ; moi, je devais dépister les résistants, pas les réfractaires. De plus, dit-il dans un sourire narquois, quand je suis parti au manoir, le patron voulait me payer, je n'ai pas voulu. "Peut-être pensait-il au salaire de misère qu'on lui aurait sans doute offert, comparé aux 3.000 F qu'il percevait par mois et à la prime qu'il allait bientôt recevoir. Selon ses déclarations, il n'a fait partie de la Gestapo qu'après les premières arrestations. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, les Allemands ne sont pas intervenus au moment du parachutage. Ne dépendant que de Paris, il lui a fallu d'abord, rendre compte à ses chefs parisiens, puis, sur leur ordre, revenir en traction avant, livrer le groupe à la Gestapo de Rennes.
Il confirme que le message qu'il a entendu était "Les engrais vont être livrés ce soir à onze heures. "
Non, il n'a jamais pris de photo de la cache et de ceux qui la creusaient. Pour se rendre à Paris, c'est effectivement par Chateaubriant, qu'il est passé. Il se souvient même avoir eu une frayeur. La chaïne de son vélomoteur s'est cassée, et il a manqué de chuter.
Les bruits selon lesquels il aurait porté l'uniforme allemand relèvent de la science fiction. "Non, jamais il n'a porté d'uniforme, d'ailleurs les deux officiers allemands qui travaillaient avec lui étaient également toujours en civil."
De même, il est absolument inexact de dire qu'il est revenu à Comblessac depuis sa libération. Il ne tient pas à y venir pour 2 raisons au moins, la première parce qu'il sait qu'étant reconnu, il court un grand risque, la deuxième, c'est qu'il lui est toujours interdit de mettre les pieds dans les 2 départements de l'Ille et Vilaine et du Morbihan.
Le point le plus proche qu' il a fréquenté, c'est Piriac, dans la Loire Atlantique
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