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  La Résistance en Ille-et-Vilaine

Le réseau Maurel  (Page 12)

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           Pour enrichir la mémoire du passé, nous recherchons des témoignages ou des documents  sur cette période   write5.gif (312 octets)

Sommaire | Introduction | En 1940 | Comment entre-t-on "en Résistance"  | Le Groupe se structure | Mamadou et les autres |  La manifestation interdite  | Un "pieux mensonge". | La Propagande  | Des postes émetteurs au parachutage. | Le commencement de la fin.. | Étienne est arrêté | L'incarcération de Renée Maurel.| Ravensbrück | Vers la liberté | Le bilan.| Témoignage d'Ellen Maurel | Témoignage d'Ety Maurel

 

Dimanche 23 août 1942 : « C'est loin, tour de rôle ? »

« En ce dimanche matin, nous étions cinq à la maison : ma sœur Manin, Odette la jeune sœur d'Etienne, mes deux filles et moi-même. La Gestapo en civil fit irruption , me commanda de faire ma valise. Ils fouillèrent la maison, pendant que mes filles me questionnaient sur mon départ. Pour les rassurer, je leur racontai alors que j'allais voir leur père, et qu'après je ne manquerais pas de les y emmener à tour de rôle. Ety, l'aînée, me fit alors cette remarque pleine d'à propos : " C'est loin, tour de rôle ?".

« Puis tout se passa très vite... J'eus le temps de demander à ma sœur de ne pas séparer mes filles, et de faire venir à Montfort ma mère pour la seconder dans sa tâche. Puis je fus embarquée dans un fourgon. Place du Tribunal, ils chargèrent à mes côtés notre courageux mécanicien, Francis Bourges. Nous quittions ce jour là Montfort. J'y reviendrai en 1945... »

Une aussi longue absence...

« Ma première expérience de l'univers carcéral s'est faite à la prison Jacques Cartier à Rennes. C'était, je pense, une sorte de gare de triage, avant les choses sérieuses ! La majorité des détenus étaient d'ailleurs des "Droit commun". J'y suis restée à peine une semaine, mais j'y ai vite appris que l'essentiel est de communiquer, pour garder des attaches avec le monde, avec la vie.

« A Jacques Cartier, les cloisons étaient minces, et des tuyauteries désaffectées permettaient de passer des messages entre ma cellule et celle contiguë, où se trouvaient plusieurs femmes condamnées à trois mois de prison pour vol de charbon...J'ai pu ainsi griffonner quelques lignes sur un morceau de papier et le leur confier. Je saurais plus tard que ma sœur avait bien reçu ce petit mot. »

29 août 1942 : départ pour "La Santé ".

« J'ai été transférée, par train, le samedi suivant à la prison de la Santé de Paris. Dans le wagon qui nous était "réservé", j'ai retrouvé nos compagnons Bourges et Barbé qui avaient été arrêtés, comme moi, le 23 août.

« J'y suis restée un mois et demi. Lorsque, après la fouille, je me suis retrouvée seule dans ma cellule, j'ai pour la première fois senti le poids du désespoir : je m'éloignais de ma famille, de mes filles, j'étais angoissée par l'incertitude de mon sort et de celui d'Étienne.

« Et pourtant, une fois encore, j'allais surmonter cette détresse grâce au pouvoir de la voix, de la communication : sans jamais voir personne, que mes geôliers, j'ai "connu" des hommes et des femmes, j'ai participé à des petits moments de bonheur, à des tragédies. Je n'étais plus seule...

« A la Santé, on communiquait soit par les tinettes, WC moyenâgeux dont chaque cellule était pourvue, soit par les vasistas qui donnaient sur une cour fermée.

« C'est ainsi que j'ai entendu échanger des mots d'amour entre Robert et sa fiancée, que j'ai connu le Pasteur et celui que nous appelions Tonton. Ces hommes, tous communistes, étaient condamnés à mort. Une vingtaine d'entre eux ont été fusillés en octobre: ce jour là, à 4 heures - instant de leur exécution - toute la prison a entonné la Marseillaise.

« Pendant ma détention à la Santé, j'ai pu envoyer des nouvelles à ma famille, j'ai reçu du courrier, 1 ou 2 colis et même une superbe photo de mes deux filles. J'avais mangé mon pain blanc, et je ne le savais pas ! »

13 octobre 1942 : transfert à Fresnes.

« Fresnes, ce fut la désolation, la crasse, l'obscurité presque permanente, le froid, la puanteur insupportable. Je suis restée presque 5 mois dans une cellule sordide. Pour tout mobilier, un sommier métallique fixé au mur, une table. On m'a apporté une paillasse et une couverture. Seule la fenêtre que j'avais réussi à ouvrir me permettait parfois de percevoir les rumeurs de la prison et de contempler le mur d'enceinte qui me servait d'horizon.

« J'ai tenu le coup en "briquant" ma cellule : chaque jour je me suis appliquée à frotter, gratter chaque lame du parquet, chaque pouce de ma table. J'ai même obtenu de mes gardiens des produits pour nettoyer la cuvette de mes latrines. J'y ai passé des semaines... Peut-être mes vertus ménagères m'ont-elles aidée à ne pas sombrer dans le désespoir ? »


4 mars 1943 : Romainville.

« Après ces mois passés à Fresnes, et qui resteront dans ma mémoire parmi les moments les plus noirs de ma déportation, mon passage à Romainville me fit l'effet, d'un véritable retour à la vie. Je n'étais plus seule, je retrouvais la chaleur du groupe. Il y avait là des femmes venues de partout : certaines n'avaient pas encore connu la prison et pleuraient. Les autres se prenaient à espérer une libération prochaine.

« Le père d'Étienne  vint m'y rendre visite : il avait vu son fils le matin même, à Fresnes. Pauvre homme qui pleurait, et qui ne savait pas qu'il ne le reverrait jamais...
« C'est à Romainville que je fis la connaissance d'Andrée, toute fraîche arrivée de Clermont-Ferrand. Elle m'avait été "confiée" par Jacqueline, la sœur du fameux Colonel Rémy. Andrée, qui allait devenir l'amie, la compagne, ma sœur d'infortune, jusqu'au bout de notre "douloureux voyage".
« Le 28 avril 1943, nous quittions la France pour Ravensbrück.
 

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 Dernière mise à jour: 14/01/2016