20/03/2010

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La peur, le qui-vive, le froid, les désertions, les blessés, les prisonniers

 

La peur, le qui-vive, les nuits froides, la boue, les gardes solitaires dans les postes avancés sous la mitraille ennemie, les patrouilles, les mortiers, les fusants, la tension, mettaient les nerfs à bout. L’hiver avait été très dur. Il y avait des mois qu’on avait pas couché dans un lit. Le courrier ne passait que sur carte ouverte. Le moral en prenait un coup. Il y avait des défections chez nous comme chez l’ennemi ; des rages de dents, des bronchites et ...des abandons de postes devant l’ennemi.

Parfois, c’était sans conséquence, et personne n’en parlait. Pourtant, un abandon de poste aux conséquences gravissimes fût officiellement démasqué à l’occasion d’un accident de la circulation survenu le 8 avril 1945 à Vannes,

Ce jour là, un camion  P.38 Citroën en cours d’immatriculation se rendait en mission de Locoal-Mendon à Rennes sous la responsabilité de Jean Macé, sergent à la C.B.I. du 1er Bataillon du 41° R.I. avec à ses côtés le Caporal Daniel Robert.

Vers 21 heures, à l’angle de la place du Maréchal Joffre et de la place Gambetta,le camion P.38 entra en collision avec une voiture particulière conduite par la femme du colonel Morice.

Les dégâts n’étant que matériels le colonel Morice demanda dans son rapport que personne ne soit inquiété pour cet accident. Mais les noms des occupants figuraient sur le rapport. C’est ainsi qu’on eût la surprise de découvrir le nom de l’adjudant H. passager hors mission dans le camion, lequel avait quitté son poste sans permission.

On savait que sa mère était malade, et qu’il souhaitait profiter du camion pour aller l’embrasser. Mais en tant de guerre, ça s’appelle abandon de poste. Et comme l’exemple vient d’en haut, l’un de ses hommes G. V. D. qui était de garde dans un poste avancé de 4 à 6 heures le 9 avril 1945, décida d’en faire autant et d’abandonner son poste de garde devant l’ennemi, pour s’en aller en barque voir une fille qu’il savait retrouver loin de la ligne de front, à Locoal-Mendon.

Le drame, c’est que ce 9 avril 1945 vers 5 heures du matin, les boches avaient décidé une incursion dans nos lignes, juste à l’endroit du poste déserté, comme s’ils étaient au courant !

Ces deux abandons de poste simultanés de la part de ces deux monstres d’égoïsme, se sont traduits par un désastre pour notre section. Pourtant ils s’en sont bien tirés. Allez comprendre ! L’adjudant H. n’a été que rétrogradé sergent-chef et le 2ème classe a bénéficié lui aussi de la clémence du Tribunal militaire. Ils n’auront été finalement moins punis que je ne le fus pour la vie par les séquelles de mes blessures. Ils peuvent remercier le Commandant Frémont.

Après la honte des bavures de Monterfil, et la honte de ces désertions et de ses conséquences, il y avait quelque chose de brisé entre nous. La rancœur allait s'installer pour longtemps contre ceux qui avait trahi la confiance de leurs camarades.

Enfin, à tout péché miséricorde ! Avec le temps, on pardonne. Mais le 9 avril 1945 est resté pour nous un souvenir de honte et d’humiliation .

 

       

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