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Tenir la presqu'île du Plec |
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Le P.C. de la nouvelle 3° Cie (notre ex-12°) se trouve désormais installé à "Listrec" en Locoal-Mandon face aux parcs à huîtres du père Landeau, vite dévasté par les FFI. On disait que larmée indemniserait. Des reconnaissances de dette auraient été remises aux intéressés ! La 12° Cie prend position le 20 décembre 1944 sur la presquîle du Plec et la Pointe du Verdon Nous avions toujours à la section engins le futur célèbre champion cycliste Louison Bobet. Voici un rapport du Commandant Frémont qui en dit long sur la situation sur le front fin décembre 1944 : |
Copie document : --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- III° Région
militaire 19° DI 41° Régiment
dInfanterie 1er
Bataillon
RAPPORT SUR LE MORAL
EN EXECUTION D UN MESSAGE TELEPHONE
DU 21/12/1944
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1 GENERALITES
1° Dordre Militaire .-
Le bataillon est intégré depuis peu dans la nouvelle armée régulière
française, dans le cadre du 41° R.I. et par voie de conséquence de la 19° D.I. prévue
depuis août comme devant être motorisée dans un avenir plus ou moins éloigné. A lépoque de
ce rattachement, les cinq compagnies F.F.I. dIlle et Vilaine qui composèrent à
elles seules le 1/41° ressuscité, se sentirent transportées de joie. Enfin on
reconnaissait en haut lieu leurs mérites certains et tous les espoirs leur étaient
permis. Parmi ceux-ci, le bataillon nourrissait celui de se voir rapidement habillé,
équipé et armé dune façon définitive afin dêtre engagé, après une
période dinstruction et dadaptation la plus courte possible, dans la lutte
décisive contre lAllemand. Le moral de tous, à ce moment là, était le plus
élevé qui se puisse concevoir. Il lest encore mais à un degré moindre, car tous
sentent plus ou moins confusément dailleurs, que la volonté darriver à ce
résultat est insuffisante aux échelons supérieurs. Il nest en tout cas maintenu
à ce niveau que par laction directe des cadres subalternes sur leurs subordonnés.
Quoi quon en dise, les liens qui unissent les hommes du bataillon à leurs chefs
directs, avec lesquels ils sont en contact permanent sont aussi puissants que divers et
jai pu me rendre compte à plusieurs reprises que les cadres et la troupe forment un
tout quil semble impossible de dissocier, sans exposer lunité à des risques
certains de désagrégation. Etre près de la troupe ne signifie pas seulement, à notre
sens, faire près delle de la démagogie facile et à la portée de tout le monde,
mais à partager complètement et avec la plus entière confiance ses joies, ses peines,
ses fatigues et ses moments de détente. Le facteur primordial de cet esprit de corps est,
sans aucun doute, la confiance absolue qui unit nos soldats aux chefs quils se sont
eux-mêmes donnés depuis de longs mois dans la Résistance et dans les Maquis. En
définitive, on peut dire que le bataillon est encore ce quon peut appeler un beau
bataillon auquel sont fiers dappartenir les officiers, sous-officiers et soldats qui
le composent. Ceux-ci sont désireux de voir encore se renforcer la tenue et
lorganisation de lunité dans le sens précité plus haut et ce, afin de
mériter sans aucune équivoque lestime, laffection et le respect de la nation
toute entière. 2° Dordre
politique .- Lunanimité
sur ce point est complète. Aucune conversation, et à plus forte raison, aucune
discussion de caractère politique nont, à ma connaissance jamais été entamées,
soit entre militaires appartenant à des compagnies différentes, soit au sein même des
unités. Et pourtant les opinions sont extrêmement diverses, bien que la majorité des
officiers, sous-officiers et hommes, soient consciemment ou non, de gauche et même
dextrême gauche ; mais ils respectent à cet égard le statut militaire et,
bien quils soient des hommes libres, volontaires pour aider à la reconquête de la
France, de son Empire et aussi de leurs libertés, ils nont pour arriver à ce
résultat quune idée « combattre » et ceci exclut cela. Jajoute
quil en est de même du point de vue confessionnel. 3° Dordre
social .- Le
milieu social est ce quil a toujours été dans larmée, cest-à-dire
très divers, mais à lencontre de ce qui existait autrefois, aucun désaccord dû
à cet état de choses ne sest produit. Ce fait nest pas autrement surprenant
si on veut bien considérer que les gradés aussi bien que les hommes du Bataillon ont
justement pris les armes pour défendre et faire triompher leur idéal social. Il serait,
à mon sens, désirable que les relations qui unissent les officiers, les sous-officiers
et les soldats du Bataillon dans le service et en dehors du service soient susceptibles
dêtre généralisées ce qui permettrait daugurer favorablement de la
solution des problèmes sociaux qui se posent en France. 4° Dordre
matériel .- Si le
moral, comme je lécrivais plus haut, est encore ce quil est, on ne peut pas
dire que cest grâce à lamélioration des conditions de vie matérielle du
soldat. Bien au contraire, hélas ! Il faut pourtant quon se persuade en haut
lieu quil est indispensable dassurer à la troupe un minimum de bien-être
matériel et physique. Or actuellement, limpéritie des services est telle que les
plus graves préoccupations des commandants de compagnie ont trait à lalimentation
et à lentretien physique de leurs troupes. Le chef de bataillon et son personnel
chargés de lapprovisionnement sont constamment harcelés de réclamations de la
part des compagnies, soit parce que le ravitaillement est insuffisant, soit parce
quil nest pas régulièrement distribué aux unités en ligne. Dans le 1er
cas, lintendance est seule en cause, dans le second, les difficultés quasi
insurmontables que nous rencontrons sont dues uniquement au mauvais état de notre
matériel roulant et à labsence presque totale de pièces nécessaires aux
réparations et à lentretien des véhicules. Je me
garderais bien de passer sous silence la question primordiale de luniformité
darmement et de munitions, le ravitaillement en ligne en moyens de combat,
labsence totale dartifices, de signaux, de fil de fer barbelé, etc ... etc
... Pour
conclure ce paragraphe, je citerai le mot dun de mes meilleurs officiers, qui est en
même temps un vieux compagnon darmes de 39-40 et de la Résistance au cours de
considérations que nous échangions récemment sur létat du matériel du Bataillon
«Il y aurait, me disait-il, des volumes à écrire à ce sujet, aussi bornons-nous
seulement à dire que, dans ce domaine, tout manque, même la bonne volonté de pas mal de
services » II OFFICIERS
La
majorité des officiers constituant lencadrement du bataillon est formé par
danciens officiers et sous-officiers dactive ou de réserve ayant participé
au début de la guerre (campagne 39/40). A une ou deux exceptions près, ils ont en outre,
fait partie de la Résistance sous loccupation. Pour eux, leur plus belle
récompense est davoir à se battre à nouveau, en uniforme, cette fois contre
lAllemagne et achever ainsi de mériter leur grade obtenu dans la Résistance. Nos
autres camarades proviennent uniquement des FFI et doivent leurs galons à leur jeune
valeur et à lénergie dont ils ont fait preuve dans la Résistance pour organiser
sous loccupation allemande des unités entièrement constituées et équipées par
leurs propres moyens et à les mener au combat. Il est évident quils manquent de
technique militaire, mais leur désir dapprendre est manifeste ; aussi
demandent-ils comme le demande lensemble des officiers du Bataillon à être
commandés et instruits dans lart du combat moderne par des chefs et des
instructeurs dignes deux, tant du point de vue militaire que du point de vue moral,
que ces chefs possèdent surtout la même foi et le même idéal que ceux dont ils sont
animés.
III
SOUS-OFFICIERS Beaucoup
sont à limage de leurs supérieurs. Presque tous sont mariés et pères de famille.
Ceux-ci ont abandonné leur travail et leur foyer pour combattre le boche et faire
triompher leur idéal. Dire quils font leur travail avec cur et surtout avec
compétence quand il sagit de la vie de garnison ou de camp serait sinon
complètement faux du moins exagéré, mais par contre, ils remplissent admirablement leur
tâche depuis que nous sommes en secteur. Rien détonnant à cela, ce sont
danciens maquisards. Pour certains dentre eux, les meilleurs et en particulier
ceux dactive, il faudrait envisager de les avantager, car ils constituent un
personnel délite, en leur donnant un avancement mérité et en facilitant, par la
suite le recrutement dofficiers de carrière dans le corps des sous-officiers auquel
ils appartiennent. A tous le séjour en secteur fait beaucoup de bien, leur instruction y
a déjà gagné et les stages de perfectionnement leur permettront encore de le
parachever.
IV
- TROUPE En
général, elle a un moral excellent, car elle est formée uniquement dengagés
volontaires ; mais il faut quand même y distinguer 3 catégories. La plus importante
(70% de leffectif) se composent de jeunes hommes ardents, animés dun haut
idéal patriotique et social. La seconde (20%) braves garçons qui se sont engagés pour
faire leur service et qui laccomplissent comme on le faisait avant 39, par devoir,
mais sans conviction profonde. Ce sont quand même de bons soldats et ils
saméliorent grandement au contact des premiers. Quand au reste (10%) il est
composé pour la plupart de désuvrés, de camouflés par force, voire même de
paresseux qui se sont engagés sans trop savoir pourquoi. Peut-être espéraient-ils un
bien être matériel facile à obtenir puisquil ne dépendait pas deux-mêmes.
Quoique cela, il ne faut pas désespérer de les amener à nos conceptions, jai
déjà été témoin de conversions de ce genre et leur contact permanent avec les
premiers cités ont déjà porté ou porteront leurs fruits. En
tout état de cause et en considérant quils sont tous et tout de même volontaires
ils doivent être encouragés et aidés par tous les moyens. Ceux qui désirent rester
pour un assez long temps dans larmée ou y faire leur carrière doivent avoir des
facilités pour suivre les cours délèves gradés. Et puis le fait est là que,
pour la majorité dentre eux, lardeur patriotique qui les anime tranche
lumineusement avec lapathie et la méfiance dune trop grande partie de la
population française. Rien que cela les rend conscients des devoirs militaires
quils sont prêts à assumer mais aussi des droits quils se sont acquis et
quils continueront dacquérir, droits que nous, leurs chefs, défendront avec
eux par tous les moyens.
I
CONSIDERATIONS D ORDRE MATERIEL Nous
concevons parfaitement que la dotation matérielle des unités en formation est pénible
en raison de la situation actuelle du pays, mais nous rendons moins parfaitement compte
que les solutions qui auraient dû ou devraient être possible ont été ou sont rendues
difficiles du fait de lapathie, de lindifférence voire même de
lhostilité dont font preuve à légard de la future armée française, les
services de lancienne impuissance de ceux-ci à réaliser la situation et à y faire
face avec des méthodes nouvelles et efficaces ou, ce qui serait plus grave, sabotage
conscient à légard des formations nouvelles du fait dindividus ou par la
jalousie ou la méfiance ? Or, il faut bien se dire que les bonnes volontés quelles
quelles soient ne résistent pas à la force dinertie, mais quon ne
sy trompe pas, nous sentons à certains indices que la patience sémousse et
quil est grand temps quon sen rende compte en haut lieu. Nous avons
jusquici tenu nos hommes avec quelques réalisations et beaucoup de promesses. Ils
savent que nous souffrons comme eux de létat de chose existant. Nous voulons nous
battre et nous demandons pour cela les outils qui nous sont nécessaires. Nous ne
demandons que cela et, pour concrétiser nos besoins, nous dirons quil faudrait
doter à bref délai nos unités du matériel, de larmement, de léquipement
et de lhabillement prévus aux derniers tableaux parus, comme ont été
dailleurs dotés les bataillons dits « de sécurité et
dinstruction » constitués en même temps que le nôtre.
IV - INITIATIVES Du
point de vue matériel, elles ont été, elles sont et elles devront être, nous le
craignons, encore très nombreuses, trop nombreuses, car dépassées, présentes ou
futures, ont tenu, tiennent ou tiendront toujours du trop fameux système
« D » que de ce quon peut appeler véritablement de linitiative.
Comment pourrait-il être autrement puisque trop souvent la réponse à nos demandes est
négative ou incertaine. Heureusement
que du point de vue moral, il en a été tout autrement. En effet, il convient de rappeler
ici que cest grâce à leur énergie et à leurs initiatives personnelles que les
officiers et sous-officiers qui se sont trouvés placés à la tête de formations issues
de la Résistance sont parvenus à organiser leurs unités et à les fournir au
commandement mises sur pied avec leurs effectifs, leurs cadres, leur armement et leur
matériel, ces deux derniers récupérés dailleurs sur lennemi. Pour
conclure ce chapitre nous nous bornerons encore une fois à citer textuellement lun
des officiers du bataillon : « Si cest de notre initiative (et ceci est
pris dans le sens le plus large, cest-à-dire, troupe, sous-officiers et officiers)
dont il sagit, quon veuille bien se reporter à la fin daoût 44 et
regarder le bataillon daujourdhui pour juger ». Et encore on aura pas
tout vu, car on ne lit pas dans les pensées.
VII SUGGESTIONS ET PROPOSITIONS Elles
ne seront pas précisées, les solutions à apporter aux problèmes posés par ce qui
précède dépassant nos facultés de résolution, toutefois nous pensons quil
serait bon denvisager plusieurs réformes, à savoir : 1°
Réorganisation des services en général et de lintendance en particulier sur des
bases modernes avec un personnel rompu aux nouvelles méthodes adoptées par les
établissements industriels et commerciaux de lépoque actuelle. 2°
Réorganisation du commandement en supprimant le formalisme archaïque et en confiant les
leviers de commande à des hommes dont le but soit de faire la guerre avant tout et tout
de suite. 3°
Application à tous les échelons du commandement de sanctions efficaces en fonction de
leurs responsabilités respectives. 4°
Suppression totale aux divers échelons et dans tous les organismes des relations
personnelles, des incapables, des fatigués jeunes ou vieux, des inactifs. 5°
Suggestion aux services de fonctionner correctement en les invitant à bien se persuader
que, sils ont été ainsi baptisés, cétait pour servir les armées
combattantes. Et
nous terminerons cet aperçu densemble en rappelant cette pensée de lempereur
Napoléon 1er qui na pas vieilli malgré les années ; « Les
hommes de valeur ne manquent pas en France, mais il faut savoir les choisir et les mettre
à leur place » Nous ajouterons quant à nous, quil faut également vouloir
les choisir et vouloir les mettre à leur place »
Aux Armées le 31 Décembre 1944
LE CHEF DE BATAILLON FREMONT
COMMANDANT le 1er
BATAILLON du 41° R.I. |
Début janvier 1945, la section est affectée à la défense de la presquîle du Plec. Cest Jean-Marie le passeur qui est réquisitionné par larmée, pour sa connaissance des lieus, des courants et des marées pour assurer la liaison et le ravitaillement par mer, notamment avec la pointe du Verdon.
Notre camarade Henri Chapon, chef cuisinier de la 12è laccompagne toujours pour le ravitaillement. Par nuit claire, ou de jour, ils ont souvent été pris pour cible par lennemi, mais heureusement jamais atteints.
Notre secteur postal était le 53.491. Notre sergent-major comptable était le Sergent Guihard. Notre infirmier, sergent fourrier, lhomme sachant tout faire était Arsène Delsaut.
Le 12 janvier 1945, le Camarade Le Pelletier est blessé à la main par balle. Le 22 janvier 1945 cest le camarade Lumière qui reçoit une balle dans le bras. Puis, le sergent Yves Sentier tombe gravement malade de la poitrine. Il ne veut pas quitter ses camarades. On lemmènera de force à lhôpital. Il sera réformé pour tuberculose le 9 février 1945.
De janvier à avril, ce ne sont que des échanges de tirs incessants de part et dautre, à larme automatique, au mortier, au canon de 27mm, aux fusants, de jour comme de nuit.
Parfois, il y a des trêves pour laisser passer des civils de la Poche de Lorient Certains camarades culottés, en profitent pour aller visiter les postes ennemis et proposer aux "affamés" (comme on les appelait aussi) du chocolat américain contre des armes personnelles.
Quand le front est calme, des musiciens allemands se font entendre, dans les postes den face. Évidemment nos mitrailleuses sont aussitôt pointées dans cette direction
Un beau jour cest le lieutenant Louis Correy qui se met aussi à cracher le sang. Lui non plus ne veut pas quitter ses camarades. Cest le médecin qui vient le chercher.
Plusieurs font des rages de dents, ce qui est mon cas. Jaurais une courte permission pour me rendre à Auray chez le dentiste qui, sans commentaire, marrache une dent.
Nous avions droit quand même de temps à autre à une période de repos dans une ferme un peu à larrière, la ferme des Glain. Il y avait là trois belles filles que les militaires courtisaient. Là, nous pouvions dormir en paix relative dans la paille fraîche du grenier, nous laver, nous changer.
Pourtant, des prémices annonçaient bien quelque chose. Notamment un tir de mortier et de fusants nourris mais heureusement trop courts de quelques mètres, et natteignant pas la ferme.
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