Le dernier convoi de
Rennes dit "train de Langeais" |
Pour enrichir la mémoire du passé, nous recherchons des témoignages ou des documents sur ce convoi de déportés Pour m'écrire 35memoiredeguerre@gmail.com
Madeleine Allard 3
(1erconvoi) Georges Dodin (1erconvoi) "Le voyage avait été prévu pour durer 3jours, mais tous ces incidents rallongent la durée du parcours. A Nantes, lors de la première distribution de pain, les prisonniers touchent une boule pour 3, le lendemain, une boule pour 7, le surlendemain, une boule pour 11 puis après plus rien. Mais il faut attendre que les gardiens n'aient plus rien dans leur musette personnelle pour qu'ils acceptent l'aide de la Croix-Rouge, du Secours National ou des civils en espérant recevoir quelque chose pour eux. " Paul Héger 1(2ème convoi) "On est arrivé à la gare de Nantes
entre 3 et 5 heures de l'après-midi. Là, j'ai eu la trouille comme tous les Rennais du
convoi parce que notre train s'est garé à côté d'un train de munitions qui allait vers
Lorient.
Joseph Abaléa (2ème convoi) Pierre Bourdan 2 (2ème convoi) "Nous passâmes Redon et bifurquâmes vers Nantes. Nous y étions au matin. Vers où irions-nous maintenant ? Bordeaux ? Le long de la Loire ? Le train était à la merci des mouvements darmées et aussi des bombardements de voies ferrées. Les Allemands luttaient à la fois contre la montre et contre le sabotage, qui se généralisait et déjouait souvent leurs calculs. Nous avions assez datouts en mains pour être confiants de trouver tôt ou tard, avant darriver en Allemagne, une porte de sortie. Aussi navons-nous jamais connu la détresse de tant de nos compatriotes, qui durent compter en mois et en années, alors que nous voulions compter en heures. Pour le moment, cétait une sorte de jeu, anxieux, mais assez stimulant pour nous tenir en haleine. Suivions-nous la retraite allemande ? Avions-nous déjà une destination fixe ? Nous eûmes un instant lespoir de rester à Nantes. Mais, avec les Américains sur leurs talons, il était douteux que les Allemands pussent nous laisser dans cette espèce de cul-de-sac. Entre-temps, les avions alliés venaient en précurseurs. Nous les verrions souvent et partout sur notre route. Le train sarrêta dabord sous un pont routier en parfait état. Pour voir ce qui se passait, il fallait se hisser jusquaux volets latéraux, qui ne laissaient pénétrer dans le wagon quune très faible lumière, et passer le nez par des barreaux. Les volets nétaient ouverts, dailleurs, que dun seul côté, à droite dans le sens du train. Sur le pont, des civils regardaient le train. Ils nous firent le signe V, de la main, derrière le dos de deux Allemands accoudés au parapet. Le passage de quelques avions fit, pour un temps, le vide sur le pont et dans les bouts de rues que nous voyions. Puis des gens revinrent nous faire des signes damitié. Nous restâmes là quelques heures sans histoire, pendant lesquelles nous fîmes plus ample connaissance avec nos compagnons. Une question au vol à un homme déquipe nous apprit seulement que, ce jour-là, nous nirions pas beaucoup plus loin. De fait, après quelques heures dattente, nous avancions de quelques kilomètres pour nous immobiliser au milieu dun faisceau de voies. Cétait la gare de triage de Nantes. Elle était encombrée de trains de marchandises il y en avait sur toutes les voies. Et, là, cétait un remue-ménage incessant demployés de toutes catégories. Comme à chaque arrêt du train, la plupart de nos gardes descendaient, à la fois pour exercer sur nous leur surveillance plus étroite et pour se dégourdir les jambes. Les uns étaient très stricts, les autres plus indulgents, non seulement selon leur tempérament, mais aussi suivant leur pessimisme sur le sort des opérations. Tous se raidissaient également dès quapparaissait un supérieur. Mais, stricts ou non, il leur était impossible, au cours de longs stationnements, dempêcher tout contact entre nous et le personnel de la gare ou de la Croix-Rouge. Nayant rien dautre à faire, en dépit dinterventions et dinterruptions plus ou moins brutales, nous finissions, bribe par bribe, par nouer des relations, établir des liaisons avec le personnel des chemins de fer. Ce nétait pas difficile. Nous savions déjà, par trois ans de renseignements, quon pouvait compter sur les cheminots et allions en avoir détonnantes preuves. Nous navions pas dhésitation à leur révéler notre identité et à leur parler de nos projets avec une liberté totale... ...Cigarettes, provisions, vin, commencèrent tout dabord par passer, à travers les barreaux, de ces mains amies dans les nôtres, au grand émerveillement de nos compagnons américains. Le partage se faisait en un clin doeil et on nous considéra bientôt comme des enfants pauvres regarderaient le Père Noël. Puis ce furent les nouvelles il y avait devant nous, au premier plan, un train de marchandises. Entre deux de ces wagons, nous apercevions le tender dune locomotive à une voie de là. Sur ce tender que nos gardes allemands, eux, ne voyaient pas, un homme déquipe nous fit, à la craie, en lettres énormes, mot par mot, le bulletin des nouvelles du jour. Une colonne américaine à vingt-cinq kilomètres, une autre sur Fougères, etc. Puis il ajouta, toujours à la craie "vous laisse maintenant soin faire commentaire ", en accompagnant cette notice dun geste imitant quelquun qui prend le microphone. Il y avait tout chez ces hommes gentillesse, dévouement, bonne humeur et la blague arrivant exactement à point pour réconforter comme un coup de vin. Rabache, Gosset et moi nous regardâmes en souriant avec presque des larmes aux yeux. Il y avait bien de la douceur à être parmi eux et à faire cette épreuve. Ce nétait pas tout. On nous fit bientôt savoir que, de lautre côté de la voie, il nous suffirait de tourner langle dun mur et le coin dune usine pour trouver "des copains et des vêtements civils ". Mais pouvions-nous sortir du wagon ? Il fallait des outils et on ne pouvait "travailler "que la nuit. Il était cinq heures. On nous avait distribué une ration de nourriture une portion de mélange de conserves, de pommes de terre et de hachis et un morceau de pain mais nous navions rien bu depuis la veille. Nos amis français venaient de nous donner du vin, mais nous réclamions de leau, dabord pour établir un précédent, ensuite parce quil y avait intérêt à faire, périodiquement, ouvrir la porte. Rabache parlementa. Nos gardes allemands acceptèrent dentrebâiller la porte pour que nous passions nos casques à des civils qui allèrent les remplir deau. Mais les casques étaient vérifiés au retour. On ne pouvait y mettre que de leau. Nos informateurs de la gare nous avaient fait savoir que lintention des Allemands était de filer le long de la Loire, mais que la ligne était coupée, sans appel. Les ponts de la Loire létaient aussi. On ne pouvait donc aller ni vers lest ni vers le sud. Il y avait des chances pour que nous restions sur place quelque temps. Et les cheminots feraient de leur mieux pour que, si lon rétablissait le trafic sur une voie, il fût plus difficile de trouver une locomotive "en état de marche ". Nous attendions donc sans trop dimpatience à la fois des instruments de travail et la nuit qui nous permettrait de nous en servir. A lexception de Walter dont les yeux ne suivaient quune idée obsédante, les Américains étaient assez détendus, conversant de certains faits de leur pays intelligibles pour eux seuls. Mais vers le soir, tout en donnant sur les roues de notre wagon les petits coups de marteau de vérification, on nous apprit que nous allions quand même pousser "un peu plus loin " ; mais " pas beaucoup plus loin ". Il nen restait pas moins que nous natteindrions pas la pleine nuit là où nous étions. A cette nouvelle, nous nous mîmes à réclamer de leau avec insistance. Nos gardes refusèrent en criant "zu spät. " Mais au moment de démarrer, un homme déquipe, risquant le tout pour le tout, nous passa très ostensiblement une bouteille deau limoneuse par le volet en hurlant "pas potable, seulement pour vous laver " et en accompagnant ses paroles de gestes expressifs destinés à être compris des Allemands. Leau potable était dailleurs rare à cause des bombardements. Le dernier garde, qui allait regagner son serre-freins, eut une seconde dhésitation. Mais notre homme déquipe arborait un sourire de bonne foi stupide si convaincant que, après un haussement dépaules, lAllemand grimpa sans dire un mot. Le train repartit. Il était déjà en marche lorsquun soldat allemand sauta à bord juste en avant de notre wagon. Gosset observa quil portait sur lépaule linsigne des parachutistes qui avaient fait la campagne de Crête. Ce que nous ignorions et ne devions apprendre quun peu plus tard, cest que, outre nos gardes, le train emportait maintenant une soixantaine dofficiers, de sous-officiers et de soldats allemands dunités diverses et que cet apport allait singulièrement renforcer leur moral en même temps que leur nombre. Pour le moment, notre premier soin cétait la bouteille. Nous en retirâmes une lame, un tournevis et une lime "La panoplie complète du parfait évadé ", comme le fit observer Rabache. Nos compagnons de route commençaient à trouver que la France était un pays de ressources et ces trois outils firent sur eux plus dimpression quune troisième victoire de la Marne."
Jean Raymond
Brabant Extrait d'un livre édité en 1996: La rafle de
Sainte-Anne-des-Bois. de Jean-Raymond Brabant-
"Quand le jour se leva, nous étions à
l’arrêt dans une gare de triage sur une voie de garage. Des cheminots, qui
passaient par-là, nous apprirent que nous étions à Houdon, près de Nantes.
Le convoi resta là toute la journée du 2 août, la nuit suivante et toute la
journée du lendemain 3 août, pour repartir à la tombée de la nuit. Pendant
que nous étions à Houdon, le nombre de détenus avait été équilibré à
soixante par wagon. L’espace entre les deux portes était réservé aux
gardiens et délimité par des cordages pour empêcher les détenus d’empiéter
sur cette partie.
Plan du site | Liste de déportés Liste de femmes déportées Liste des évadés
|