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Le dernier convoi de Rennes  dit "train de Langeais"
Le 4 août, à 9 heures, Rennes est libérée

      Pour enrichir la mémoire du passé, nous recherchons des témoignages ou des documents  sur ce convoi de déportés  

Pour m'écrire 35memoiredeguerre@gmail.com

La préparation de la prise du pouvoir

La relève du pouvoir politique a été préparée par le C.N.R. et par les autorités d'Alger depuis plusieurs mois. En Bretagne la prise du pouvoir par la Résistance fut soigneusement préparée par le M.L.N (Mouvement de Libération Nationale) de la  Région. En octobre 43, l'ancien sénateur maire radical de Brest Le Gorgeu est désigné pour être le Commissaire de la République  et Cornut Gentil , Préfet de la Libération. d'Ille-et-Vilaine.

Pierre Herbart  (Le Vigan) fut désigné par le mouvement   pour être le chef régional en Bretagne. C’est lui qui dut  déterminer les conditions et le moment de l'insurrection de la Résistance contre les Allemands. Dès le début, ce plan d’insurrection fut gêné par le manque d’armes et le peu d’espoir d’en obtenir, plusieurs essais de parachutages ayant échoué. Il fut contrecarré aussi par l’impossibilité où fut Herbart d’élaborer un plan d’ensemble, le Front National, qui possédait des éléments assez importants dans la région, ayant fait preuve d’une extrême mauvaise volonté.

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Pierre Herbart 

"En juin 1944, je fus chargé d'une mission délicate entre toutes : mettre en place dans les départements dont j'avais la charge, les nouvelles autorités civiles avant l'arrivée des troupes alliées. pour mettre en place les nouveaux préfets, encore fallait-il que les anciens eussent été mis à l'ombre. De combien de temps disposerais-je pour réaliser ce tour de passe-passe ? Je vivais l'oeil rivé sur l'actualité. Mon commissaire de la République et mon préfet départemental, je les avais sous la main, bien que j'ignorasse(consigne de sécurité) où ils habitaient. Nous nous rencontrions  sur des routes, en dehors de la ville. A l'heure H, je les chambrerais dans un local préparé à l'avance, tandis que je coffrerais les Vichyssois. Peu à peu je devins la proie d'une obsession particulièrement tenace : me tromper de préfets. Confondre les bons; hisser les mauvais sur le pavois. Bref, je vivais dans l'angoisse. Et puis à quel moment devrais-je subtiliser les méchants préfets, à quel moment extraire les bons de leur cachette pour les conduire dans leur préfecture Avec les Américains, c'était difficile de prévoir. Ils campaient à cinq kilomètres de la ville et ne se décidaient pas à entrer. J'avais beau leur envoyer des estafettes munies de suppliques, ils me faisaient répondre OK, c'est tout. J'avais une frousse intense. D'autant plus que sans aucune raison valable, la ville étaient bombardée. ? 15

Les principaux collaborateurs de Pierre Herbart étaient les membres de Défense de la France, soit issus des groupes locaux, soit venus exprès de Paris : Francis Cleirens (François Constant), François Delhomme (Franck), Maurice Delarue (David), Hubert de Solminihac (Hémeric), Mme Martin (Pierrette), infirmière de la Croix Rouge, dont le bureau servait de "poste de commandement" et aussi Pierre Héger (Le Gall), responsable militaire M.L.N. de l’Ille-et-Vilaine.

"Dès la retraite allemande et avant l’arrivée des troupes américaines, selon les règles qui avaient été dûment établies. Les négociations furent délicates, mais toujours courtoises; Herbart-Le Vigan sut faire preuve de beaucoup de diplomatie, de patience, de gentillesse tout au long des pourparlers."14

"Le plan de prise du pouvoir est mis au point avec le futur Commissaire de la République, Le Gorgeu , et le futur préfet d’Ille-et-Vilaine, Cornut-Gentil.. Le Gorgeu  voulait tenir son pouvoir du général de Gaulle et non pas des Mouvements de Résistance. Cependant, par la force des choses, il fallait bien que ce fût un Mouvement de Résistance qui prît les dispositions pour qu’il pût occuper son poste (peut-être des combats seraient-ils nécessaires . Herbart, accompagné de Cleirens, se rendra à la Préfecture et arrêtera le préfet régional (Robert Martin) et le préfet d’Ille-et-Vilaine (Bouché-Leclercq), tandis que  Solminihac ira s’emparer de la mairie et que Delarue s’occupera de la police et de la prison. "14.

 

Le Comité Départemental de Libération chargé d'unifier les forces politiques et les mouvements de résistance  est présidé par un magistrat (radical-socialiste) de Kérambrun. Le Maire est aussi désigné pour assurer la gestion de la ville. Ce sera Yves Milon.

Les Américains contournent Rennes

Les Américains qui venaient de libérer Avranches  se trouvent arrêtés aux portes de Rennes le 1er août par une batterie de D.C.A. allemande . En quelques minutes, une dizaine de chars  et de véhicules légers sont détruits. Une cinquantaine de soldats sont tués ou blessés et une vingtaine sont faits prisonniers.

Les Américains détruisent l'église de Saint-Laurent qui sert d'observatoire aux artilleurs allemands des deux autres batteries de D.C.A situées au sud et au sud-est de la ville.La ville subit alors un bombardement d'obus américains. Le général américain Wood demande les troupes d'infanterie pour investir la ville. Une confusion sur la stratégie de la progression des troupes alliés  et des problèmes de communications avec l'Etat Major pendant la journée du 2 août ne permettra aucune progression.. Le Général Wood obtiendra le feu vert pour contourner la ville   progresser vers Nantes .

 

René Chesnais dans son livre sur "La guerre et la Résistance dans le sud de l'Ille-et-Vilaine "décrit bien la progression des troupes américaines au moment de la Libération de la ville de Rennes:

"Deux groupes de combat le C.C.A et le C.C.B. précédés d'éléments de reconnaissance avec véhicules  et chars légers, survolés d'avions d'observation et protégés  sur leurs côtés par des flancs-gardes.

Le C.C.A., commandés par le colonel Bruce Clarke, partant de Saint-Aubin-d'Aubigné, libère Melesse, Montfort, Talensac, Baulon, Maure, Lohéac, Messac et parvient en début d'après-midi à Bain-de-Bretagne.

Le C.C.B., commandé par le général de brigade Holmes Dager, partant de Sens, libère Hédé, Montauban, Plélan, Guer, Carentoir, Sixt, traverse la Vilaine à Langon et s'installe le soir à Derval. mais des éléments de reconnaissance sont beaucoup plus loin: à la Chapelle-sur-Erdre, aux portes de Nantes et près d'Angers. La Loire est atteinte.  ..

La voie est libre pour les Américains, mais les ordres sont formels: il faut prendre Rennes: la ville qui a été attaquée dans la nuit du 3 et 4 par des éléments de la 8 ème Division blindée, venue de Normandie en camions, se voit maintenant encerclée par le sud.

Le 4 août au matin, le général Wood, qui a sous ses ordres la 8ème Division blindée donne l'ordre d'attaquer Rennes de manière concentrique, le C.C.A. progressant de Bain-de-Bretagne par les routes qui viennent de Nantes et de Châteaubriant vers Rennes. la 8ème Division attaque du nord et de l'est.

Mais il n'y aura pas pratiquement de combat, Rennes est vide d'Allemands. Le XXVème corps d'armée allemand va ordonner à ses unités dispersées en Bretagne de se replier sur Brest, Lorient  et quelques points d'appuis fortifiés. Le général Koenig, commandant les éléments divers rassemblés à Rennes, après avoir subi des pertes de 60 tués et 130 blessés, a reçu du général Hauser l'autorisation d'abandonner Rennes et de faire route vers Saint-Nazaire. cet ordre de repli est donné à 23 heures, le 3 août. la garnison allemande, divisée en plusieurs formations, a quitté la ville   à trois  heures du matin, le 4 août, après avoir détruit tous les ponts, sauf un. Ils se dirigent vers le sud, avec précaution, chaque groupe précédé d'un élément de reconnaissance, de chaque côté de la Vilaine. Il leur faudra traverser plus de 60 kilomètres de terrain déjà libérés par les Américains.

C'est la raison pour laquelle eurent lieu, entre le 4 et le 6 août, tellement d'accrochages, dans le sud du département entre Américains, Allemands et F.F.I. qui, en plusieurs endroits, subirent des pertes : à Maure, Messac, Pipriac et surtout Langon.

 

Rennes se libère

Marie Granet dans son livre , "Défense de la France." explique la passation du pouvoir politique juste avant l'arrivée des Américains.

Le 3 août les Américains ignorent si les Allemands sont encore dans la ville et ils ont l’intention de la bombarder s’ils ne reçoivent pas de renseignements précis sur l’emplacement des forces allemandes. Herbart les leur fait parvenir et espère que, les Allemands étant tous partis précipitamment, les Américains vont entrer tout de suite dans Rennes. Il faut donc immédiatement "prendre" la Préfecture, l’hôtel de ville, les principales administrations. Le scénario, soigneusement préparé, se déroule sans incidents graves. Herbart expose aux deux préfets "qu’il représente la Résistance, qu’il est chargé de mettre en place les nouvelles autorités administratives, qu’il va les faire conduire à l’Hôtel de France (le meilleur de la ville) et qu’il leur demande de ne pas en sortir. Ils seront, d’ailleurs surveillés". Tous deux acceptent sans difficultés, assez effrayés, semble-t-il, et n’essaient pas d’employer la force, bien qu’on ait trouvé, par la suite, une mitrailleuse allemande dans la salle de bains du préfet..."

 

Hémeric (nom de résistant de M. de Solminihac, muni d'un ordre de mission va investir la Mairie le 3 août vers 19h 45 avec 4 autres résistants. Ils entrent dans le bureau de M. Patay, Maire du Gouvernement de Vichy, entouré de ses adjoints et de ses secrétaires. Le Maire est prié de se rendre à son domicile particulier et de se considérer comme prisonnier. Il refuse fermement et tente de téléphoner au commissaire de police (Piat) qui vient d'être arrêté, aisnsi que l'intendant de police (Tosselo-Bancal.

" Il téléphone alors au préfet - qui vient aussi d’être arrêté. Il n’ose faire appel aux Allemands bien qu’ils occupent encore une partie de la Mairie... Il écrit sa lettre de démission et passe les pouvoirs à son premier adjoint M. Gripon,  sous le contrôle de Solminihac. On lui donne l’autorisation de se retirer dans une propriété qu’il possède dans les environs de Rennes."14

Les Allemands dans leur fuite ont mis le feu à la Mairie. Le foyer est rapidement maîtrisé.
"Tous le dispositif de "prise de pouvoir" a donc parfaitement fonctionné : simultanément, toutes les administrations - préfectorales, municipales, police, P.T.T., Banque de France - sont tombées entre les mains de la Résistance. Les institutions de Vichy, caduques, se sont décomposées comme un fruit pourri et les institutions minutieusement élaborées dans la clandestinité ont facilement pris leur place : il a suffi de vingt hommes pour "occuper" la préfecture, de dix pour "occuper" la mairie avant le départ des dernières unités allemandes.

"Car les Allemands ont encore des détachements dans la ville... et les Américains n’arrivent pas... Étonnés, les occupants reviennent "armés jusqu’aux dents". "Vont-ils combattre ?", se demandent les Rennais inquiets. Non, ils allument des incendies (arsenal, manutention, écoles), ils minent les ponts et les font sauter. Tout Rennes entendra ce bruit lugubre dans la nuit du 3 au 4 août...

"Une lueur rose éclaire la ville. Par là-dessus, de lourds nuages de fumée noire... Au beau milieu de la nuit, des explosions formidables ébranlent la préfecture : Les ponts ont sauté.

"Vendredi 4 août. - 9 heures du matin :

 Une magnifique Citroën à fanion tricolore arrive devant la préfecture. Sur l’aile, un F.F.I. muni d’un brassard et d’une mitraillette. Un petit homme à cheveux blancs et à lorgnon descend. C’est Le Guillou, alias Le Gorgeu, Commissaire de la République pour la Bretagne (ancien maire de Brest). Herbart (Le Vigan) l’accompagne. On hisse le drapeau sur le portail de la préfecture. Le commissaire de la République nous serre la main sur le perron et nous fait entrer dans sa nouvelle résidence. Il sort de sa chaussure un petit bout de papier : c’est le texte de sa nomination. Il se termine par ces mots : "Le présent décret ne sera pas publié au journal officiel. Fait à Alger, le..." Puis, M. le Commissaire, très ému, y va d’un petit discours : la Bretagne..., La France..., Brest..., le général de Gaulle..., la République )...

"Quelques minutes plus tard... c’est le colonel de Chevigné, commandant militaire de la région. Nouveau discours : "Le général de Gaulle..., la France..., tombée à zéro..., nous avons touché le fond..., remonter la pente..., effort nécessaire."

Vers dix heures, le premier blindé américain fait son apparition sur la place de la Mairie venant de la rue d'Estrées suivi de plusieurs jeeps.

"Enfin, les premiers Américains. Visages basanés, mâchonnant du chewing-gum. Extraordinaire équipement. D’abord les fantassins, en file indienne, de chaque côté de la rue, puis les camions, les voitures, les chars en flots interminables.

"La foule a envahi les rues pavoisées, hier désertes. On crie, on rit, on s’embrasse, on applaudit, on brandit des drapeaux, on baragouine de l’anglais, on casse la gueule aux derniers collabos...."

  
Dans l'allégresse générale, on en oublie presque qu'un drame s'est joué la veille de la libération de la ville.

 

Sources:
13 Histoire de la Résistance en Bretagne - Christian Bougeard
14   "Défense de la France."   1960, Marie Granet PUF 1960
15 La ligne de force p 142/143. Pierre Herbart Folio Gallimard n° 1228, 1980
16 La guerre et la Résistance dans le sud de l'Ille-et-Vilaine. René Chesnais- Témoignages 1999

Sites à visiter: La Libération de Rennes   et Documents photographiques des Archives Municipales de Rennes

            

                                              f2gr15.gif (202 octets)  fgr15.gif (168 octets)  fd15.gif (168 octets)  Redon libéré le soir du 4 août

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11/02/2019