CENTRE D’HÉBERGEMENT POLONAIS de SALIES-du-SALAT

 Rapports de visite du secours Quaker de Toulouse

 

Secours Quaker                                                                                                        le 14 décembre 1945
Délégation de Toulouse
BO/-MLF

CAMP POLONAIS DE MAUVEZIN

Visite de Stanley Johnson et Toot Bleuland le 27 novembre 1945

Direction

Le chef de camp français est le capitaine LACROIX, le délégué de la Croix-Rouge polonaise: M. WAGNER.

Effectif: Il y a 441 personnes au camp :

- 158 hommes
- 164 femmes
- 51 enfants de 0 à 6 ans
- 68 enfante de 6-14 ans

C'est la première fois que nous visitions ce camp.

Écoles

Il y a deux classes et une garderie d’enfants, pour laquelle il y a une surveillante polonaise. Les 2 institutrices sont polonaises également. Il y a une classe pour les jeunes et une autre pour les plus âgés. Cependant, il y a des enfants de 16 à 17 ans qui suivent les cours avec les enfants de 14 ans. Ceci, puisqu’ils ont été pendant longtemps dans les camps et sont par conséquent très en retard pour l’école.

Foyer

M. STROWINSKI, le représentant de l’Y.M.C.A. s'occupe tout spécialement du foyer.

Infirmerie : est pour les premiers secours. Pour le moment, il n'y a que 3 enfants malades des oreillons et de la rougeole. Un enfant a été transporté à l’hôpital d'Auch où on a dû l'amputer de trois doigts. Il avait trouvé un détonateur qui a explosé.

II y a une infirmière française et une infirmière polonaise. Le Docteur est français.

Douches

Elles fonctionnent 6 à la fois les samedis. Seulement, depuis 15 jours elles sont en réparation. Il y a un fonctionnaire de la ville, qui vient spécialement pour assurer le service des douches. Tous les enfants sont obligés d’en prendre.

Vermine : Heureusement, il n'y a pas du tout de vermine.

Chauffage

Le camp consomme 3,5 tonnes charbon par semaine. On donne 50 kg de charbon plus du bois par baraque et par semaine. 4 stères de bois par semaine (1 stère pour les douches et 1 pour la cuisine). Le camion va chercher 70 M3 de bois par mois.

Ravitaillement

Grâce aux efforts du capitaine LACROIX, les hébergés ont toujours encore les rations militaires pour tout le monde y compris les enfants.

Lait

Jusqu'au 1er novembre, il y avait 100 litres de lait par mois. Depuis cette date la quantité varie entre 55 et 80 litres par jour. Cependant, les malades et les enfants de 7 à 13 ans touchent régulièrement 1/4 de lait par jour; les enfants en dessous de 7 ans touchent selon leur catégorie.

Viande : Tout le monde touche 100 g de viande par jour.

Pain : 450 g sont distribuées à chaque personne.

Vin : ½ litre est donné à tout le monde tous les jours.

Sucre : Chaque personne touche 750 g de sucre par mois.

Savon:  Il y a du savon liquide du ravitaillement et du savon américain pour les enfants.

Matières grasses

Depuis 2 semaines le camp n'en a pas touché, mais il y avait encore 35 kg de margarine en réserve qui sont distribués maintenant.

Tabac : Les hommes touchent la ration civile qui est payée par l’État.

Goûters

La Croix-Rouge polonaise prévoit des goûters pour les enfants de tous les camps (flocons d'avoine, biscuits et cacao).

Vêtements

Le Ministère des Prisonniers et Déportés a donné un assez grand nombre de chemises pour les hommes et tous les hommes et la majorité des femmes ont touché des chaussures rénovées anglaises, certains même deux paires. Presque tout le monde a touché des vêtements.

Baraques

II y a 6 baraques occupées par les hébergés. Elles sont claires et propres et il y a environ 40 personnes par baraque. Malheureusement les baraques ne sont pas comme dans les autres camps, divisées en chambres pour les familles et les gens ne peuvent pas s'isoler du tout.

Quelques familles cependant ont mis des couvertures pour se donner un semblant d'intimité. Le capitaine LACROIX a voulu faire cloisonner les baraques, mais ce travail coûterait trop cher et il n'a pas pu l'entreprendre.

II y avait une vieille femme qui était en train de filer. Les baraques ont chacune 3 poêles et elles sont chauffées toute la journée.

Occupations de loisirs

Le capitaine a crée une section sportive. Ils ont plusieurs ballons de football, des jeux de ping-pong, etc.

Il y a un groupe de théâtre et quelqu'un qui fait de très jolis décors. Ce groupe a donné une représentation dernièrement où les personnalités de Mauvezin ont été invitées.

Instruments de musique: II y a une guitare, une mandoline, un violon et un accordéon.

Bibliothèque : Elle n’est pas très grandes (40 livres en polonais.

T.S.F. : Il n'y a qu'un tout petit poste de T.S.F.

Cuisine.

En dernier lieu nous avons visité la cuisine qui n'est pas très propre.

II y a de la confiture pour tout le monde (de la "marmelade"). Dernièrement, les hébergés ont été tous les salsifis. Moi-même j’ai vu les cabinets bouchés avec des pâtes et autre nourriture.

Ils font du marché noir en grand. Les gendarmes en ont saisi un dernièrement une dizaine de chemises et pantalons américains tout neufs et qui étaient venus en ville pour 1000 francs pièce.

Un autre garçon, qui n'avait pas de travail, a été arrêté à cause d'un incident en ville et il avait 4500 francs sur lui. D'après l'interrogatoire il résulte, qu'il est nourri par sa mère qui, elle, habite le camp de l'Isle-Jourdain.

Travail

Dans le camp, on dépense 8000 francs par mois pour le cuisinier et ses aides, le menuisier, les coupeurs de bois, le chauffeur, etc.

Personne n'a accepté de travailler bénévolement et aucune personne ne travaille en ville. Beaucoup sont de petits propriétaires en Pologne qui ont eu de bonnes nouvelles de chez eux et ne demandent qu'une chose : c’est de rentrer chez en Pologne immédiatement. Cependant, leur rapatriement ne se fera pas avant le printemps prochain.

Croix-Rouge polonaise

Elle donne une somme de 75000 francs par mois comme argent de poche à raison de 150 francs par adulte et 50 francs par enfant.

Impression générale

Selon le capitaine LACROIX et M. WAGNER, il manque la bonne volonté du camp pour aider même pour chauffer l'infirmerie. Il n'y a pas du tout d’esprit de communauté et il y a souvent des querelles et des bagarres. Le rôle de M. WAGNER est très difficile. Tout le inonde se plaint et a des réclamations. Nous avions beau leur expliquer qu’ils vivaient bien mieux que les Français, ils ne voulaient pas comprendre. Ils trouvent qu'ils n'ont pas assez de pommes de terre et se plaignaient amèrement. Les femmes surtout sont terribles pour cela.

On a même déconseillé au Consul polonais de venir au camp de crainte de bagarres.

Stanley Johnson                                                    Toot Bleuland
Délégué                                                               Déléguée

 

Source: American Friends Service Committee Records Relating to Humanitarian Work in France, 1933-1950.

Séries II TOULOUSE OFFICE. Sub-series: REPORTS Box 26 Folder 17. American Friends Service Committee 1501 Cherry Street Philadelphia, PA 19102

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