SECOURS QUAKER BO/MLF le 15 mars 1946 1946
Délégation de Toulouse
CAMP de LABOUHEYRE (Landes)
(Dépôt P.G. 186)
Visite de Toot Bleuland et Stanley Johnson le 12 février 1946
Sur la demande spéciale du colonel Branlat, commandant la 18ème Région, nous avons visité ce camp qui se trouve en dehors du village sur un terrain sableux.
En l’absence du commandant, nous avons vu son adjoint, le capitaine JOST, un homme de 33 ans, qui nous a fait une bonne impression et qui est apprécié des prisonniers.
Effectif
L’effectif total y compris les kommandos, est de 6800 prisonniers dont 636 se trouvent au camp même.
Décès
Pendant l’été et l’automne derniers, il y a eu un grand nombre de décès, de 4 à 7 décès par jour. Cependant, depuis que les denrées de la Croix-Rouge américaine ont fait leur effet, la situation s’est améliorée. Malheureusement, l’état de santé fut tellement mauvais qu’il aurait fallu que ces envois américains continuent au lieu d’être arrêtés. Maintenant qu’il y a un nouveau commandant au camp depuis le début du mois, il se donne du mal pour tâcher de mieux nourrir les prisonniers. Mais nous avons été péniblement frappés par le teint cireux et pâle de la plupart des prisonniers.
KOCH, l’homme de confiance, nous a raconté comment pendant l’automne et après l’appel, les prisonniers tombaient par terre, morts par faiblesse générale.
Cimetière
Le cimetière qui touche le camp, est un témoin muet de cette période. 217 prisonniers y reposent pour toujours. Le capitaine Jost nous racontait qu’on allait aménager ce cimetière et le faire entourer d’ifs qui venaient d’être commandés.
Entre le 20 janvier et le 12 février, il n’y eu qu’un seul décès. Le capitaine Jost est « d’avis qu’aucun prisonnier ne doit mourir au camp ».
Médecins
Il y a un jeune médecin allemand au camp et un dentiste. Le médecin français vient tous les lundis et vendredis et le médecin-chef du camp hôpital de Buglose près de Dax, vient également 2 fois par semaine au camp.
Douches Les douches fonctionnent le samedi et le dimanche pour tout le monde.
Chauffage
Insuffisant, bien que le bois ne manque pas dans les Landes.
Vermine
Toutes les baraques sont infestés de punaises et pendant l’été, il y en avait tellement que les hommes ne fermaient pas l’œil de la nuit. Il y a encore des poux mais beaucoup grâce au D.D.T.
Eau
Le camp manque d’eau potable et il y a des écriteaux avec « Kein trinkwasser » (eau non potable), à tous les robinets. Toute l’eau que les prisonniers boivent se trouve dans la soupe et le café du matin.
Baraques
Le camp a été bâti par les Allemands pour les prisonniers de, l’Afrique du Nord et les baraques sont en bois et sont très sombres. Les meilleures dont les toits sont en forme de demi-cercle sont utilisées pour l’infirmerie.
Literie
Tout le monde est couché dans des lits en fer (infirmerie) soit des châlits à double étage. 60 n’ont pas de couvertures du tout et 260 manquent de paillasses.
Les baraques font en général 40 m de long. Dans une baraque, logeaient des hommes d’un certain âge, plusieurs même de 58 à 60 ans, qui couchent à 70 au lieu de 40 normalement. Ceci à cause des châlits à double étage.
Dans cette même baraque, nous avons vu des hommes(28) qui apprenaient le français à l’aide de quelques exemplaires du Nouveau Testament et une grammaire.
Infirmerie
70 malades sont alités dont plus plusieurs pour des œdèmes de la faim.
L’autre maladie, à part les accidentés du travail (parmi eux ceux des kommandos) sont la névrite, rhumatisme, des oedémiques avec plaies ouvertes, la furonculose (surtout parmi les jeunes) et beaucoup cas de « fièvre moscovite », genre de malaria.
L’aumônier catholique avec lequel nous avons parlé longuement pleurait d’émotion en nous racontant ces mois terribles où les hommes tombaient comme des mouches et l’impuissance des docteurs et des hommes de foi à pouvoir aider. Il savait qu’en parlant avec certains, le soir, il était sûr de les trouver morts le lendemain matin et ils attendaient avec tant d’impatience leur rapatriement. Ce fut très dur pour les médecins et pour les aumôniers.
Ravitaillement
300 prisonniers malades ou faibles ont un supplément de nourriture journalier de :
- 40 g de nouilles (60 au lieu de 20 g)
- 10 g de pois secs (20 g au lieu de 10 g)
- 20 g de fromage ou 15 g de confiture
- 100 g de viandeDepuis quelque temps, tout le camp touche de temps en temps du poisson au lieu de la viande. Le capitaine Jost a annoncé à Koch qu’un wagon de pommes de terre allait arriver dans deux jours.
Calories
Le nombre de calories selon les nouveaux calculs français se montent à 2000 pour le camp et 2300 pour l’infirmerie, ce qui fait environ 1700 et 2000 selon l’ancienne table de calories.
Denrées de la Croix-Rouge américaine
Un wagon est arrivé de Genève contenant du chocolat, du cacao, du sucre, des nouilles, des pois et du tabac. Ces denrées doivent être payées soit par le camp, soit par les P.G. eux-mêmes.
Cantine
Il y a une semaine où les P.G. peuvent acheter de la farine, des flocons et des articles de toilettes.
Parmi les P.G. du camp, il y a 131 inaptes et 185 qui puissent faire des travaux légers.Cabinet dentaire
Le dentiste n’a pas de fraise, ni de vrilles et il manque d’injection pour insensibiliser. Il manque également de matériel pour plomber. Le dentiste nous a dit que les dents des P.G. étaient dans un très mauvais état.
Moral
Nous avons longuement parlé avec les deux aumôniers protestants qui étaient d’abord au Polo. Ils s’appellent KELLER et BURGER et ils font un bon travail au camp. Les deux nous ont dit cependant, qu’il ne leur est guère encore possible de visiter les kommandos, qui auraient un très grand besoin de confort, faute de transport et de gardes pour les accompagner. Peut-être les autorités françaises du camp ne comprennent-elles pas l’importance du travail des aumôniers.
Orchestre
Le Y.M.C.A. a donné un accordéon, 2 violons et une guitare mais les prisonniers seraient heureux de recevoir encore d’autres instruments de musique.
Théâtre
Un petit groupe de théâtre s’est formé, avec quelques acteurs, un chanteur et un clown. Ce groupe est transporté par wagon de kommando en kommando.
Journaux
Le camp reçoit le journal des prisonniers et nous avons vu une petite exposition de dessins et croquis sur la vie des prisonniers pris sur le vif. Ces dessins étaient affichés sur une espèce de panneaux en plein air et protégés par un toit.
Besoins urgents
- Vêtements
- Livres
- Cahiers et crayons
- Papiers de toutes sortesLaissé au camp
- Savon……………………6 morceaux de 250 g
-Thon……………………10 btes
- Bouillie maltée………...8 btes
- Margarine…………...…3 btes
- Cacao…………………..2 btes
- Ramaltin……………...15 btes
- Biscuits à la viande……1/2 caisse (11 kg)
- Flocons d’avoine………10 kg
- Vitamines …………….300 sachets
- Caleçons……………….40
- Sous-chemises………..40
- Chaussettes…… …….50 paires
- 6 évangiles selon St-Jean
- 7 Nouveaux Testaments en français
- 9 Nouveaux Testaments en allemand
- 10 « Morgenwache »
- 3 « «Losungen
- Quelques brochures QuakerCordonnerie
- 1/2 paquet de fers pour chaussures
- 3/4 paquet de pointes pour chaussures
- 1 lime
- 3 bobines de fil
- 1 pierre émeri
- 2 balles de cire (talons)
- 5 boîtes de pointes
- 2 tiges alène
- 15 alènes
- 1 bidon d’huile
- 6 cuirs à rasoir
- 6 paquets de lames de rasoir
- Quelques jeux
C BLEULAND Stanley JOHNSON
Déléguée Délégué
Source: American Friends Service Committee Records Relating to Humanitarian Work in France, 1933-1950. Séries II TOULOUSE OFFICE. Sub-series: REPORTS Box 26 Folder 18-1. American Friends Service Committee 1501 Cherry Street Philadelphia, PA 19102
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