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Pierre ADEUX 

         Pierre Adeux ne s’est jamais fait reconnaître comme Résistant car il n’a pas fait d’actions, directement, contre les Nazis et pourtant, les Résistants, et surtout ceux du maquis avaient besoin de gens comme lui pour survivre et pour agir.

         Pierre Adeux voit le jour dans une famille d’agriculteurs à aux Balluaux en Corps-Nuds, près de Chanteloup. Il est un élève brillant et continue ses études à Rennes. Après le baccalauréat, il entre en faculté car il voudrait devenir professeur de philosophie.

         Mais c’est la Seconde Guerre mondiale, les Allemands occupent une grande partie de la France et, en particulier, toute la Bretagne. Début 1943, il est convoqué à la Kommandantur car il a l’âge de partir au STO (Service du Travail Obligatoire). Heureusement, il connaît Léon Gendrot, responsable du groupe FTPF de Crevin qui, grâce à un instituteur secrétaire de mairie et Résistant, Monsieur Beauplet, lui procure de faux papiers où il est déclaré « agriculteur ».  Grâce à ces papiers, il n’est plus obligé de partir travailler en Allemagne mais, par contre, il doit rester à la ferme avec ses parents. Plus question d’aller à la faculté !

         Il rencontre alors un ancien camarade qui lui dit : « Tu me reconnais, on m’appelait le Boche ! » Il s’agit de Serge Hernani. Comme il n’a pas voulu partir au STO lui non plus, encouragé en cela par Andrée Récipon de Laillé, il s’est engagé dans le groupe de Résistants de Malestroit. Il demande à Pierre Adeux de les rejoindre ou, au moins, de les fournir en pain et en viande.

         Pierre Adeux ne souhaite pas partir dans la clandestinité mais, par contre, il s’organise pour trouver du pain et de la viande et pour la porter à des relais qui achemineront ces denrées jusqu’au maquis de Malestroit.

         A la ferme, ses parents cachent déjà Joseph Gatel qui est, lui aussi, réfractaire au STO. Il restera camouflé là pendant 22 mois. Il a travaillé avec son frère qui est boulanger à Romillé et, avec lui, il a appris à faire du pain. Il va donc faire du pain pour les Résistants. La ferme est équipée d’un four à pain comme toutes les fermes de l’époque.

         Il faut trouver de la farine. Pierre Adeux porte du blé dans deux moulins, un de Bourg-des-Comptes et un de Pléchâtel, pour ne pas éveiller les soupçons en transformant trop de blé à la fois. A chaque fois, il porte le blé et récupère la farine correspondante.

         Il faut aussi trouver de la viande. Serge Hernani lui a dit : « Tu n’as qu’à tuer un cochon ! » Mais ce n’est pas si simple car les parents n’en ont pas beaucoup et il est obligé d’en acheter chez des voisins qui sont plutôt complices. Ensuite, il faut tuer le cochon et ce n’est pas facile quand on n’a pas l’habitude. La première fois, il a essayé de le tuer avec un gros révolver, un Parabellum, mais il n’a pas réussi. Il a dû se faire aider par la famille.

         Puis, il s’organise et régulièrement, au moins une fois par semaine, il tue un cochon la nuit, le prépare, pendant que Joseph Gatel fait du pain et vers trois heures du matin, il charge le tout dans une carriole vers Bourg-des-Comptes ou Laillé où il a des relais.

         En général, les Allemands ne s’en occupent pas mais les gendarmes du Sel-de-Bretagne surveillent ses déplacements. Souvent, ils l’attendent aux « Quatre Routes » entre Chanteloup et Le Sel-de-Bretagne et ils lui posent des questions auxquelles il trouve, tant bien que mal, des réponses.

         Un jour, en 1944, les gendarmes veulent le mettre en état d’arrestation, ils ne veulent pas le laisser continuer sa livraison. Alors, il prend un papier, un crayon et note les noms et les numéros des gendarmes et il leur dit : « Vous n’avez pas peur de ce qui va vous arriver à la Libération ? » Les gendarmes changent de ton car ils savent que la victoire n’est plus du côté des Allemands et des collaborateurs. Ils lui disent : « Si vous nous donnez votre papier, on vous laisse partir ! » C’est ce qu’il fait et ils ne l’ont plus ennuyé.

         Il réussit ainsi à alimenter le maquis pendant un certain temps mais il a des difficultés à se procurer de la farine dans les moulins. Les Résistants de Malestroit lui font parvenir de l’essence parachutée pour alimenter un moulin qui permet d’écraser le blé et l’orge à la ferme. Evidemment, le pain ne doit pas être très bon…

Pierre Adeux raconte : «  A la ferme, nous avions un gros poste de radio et nous avions installé une grosse antenne dans la cour. Les voisins venaient écouter la BBC. Certains faisaient parfois deux kilomètres pour venir écouter. Au château du Châtelier, il y avait des collaborateurs notoires dont des autonomistes bretons. Deux d’entre eux ont demandé pour venir écouter la radio avec nous quelques jours avant la Libération ; 25 ou 30 FFI les attendaient, à plat ventre autour de la ferme et les ont arrêtés. Ils sont passés en procès et ont été condamnés aux travaux forcés.

Comme je n’avais pas fait de service militaire, après la Libération, j’ai été appelé à Rennes pour rentrer dans la Police Judiciaire afin d’arrêter les miliciens. Roger Busnel de La Mézière était mon chef. Nous étions chargés de « l’épuration » mais comme nous n’avions pas de formation, nous étions encadrés par des militaires. »

Pierre Adeux aurait pu devenir commissaire de police mais il n’a pas voulu. On lui a proposé de rentrer aux imprimeries Oberthür, il y est resté 25 ans et a fini directeur commercial. Mais l’entreprise a été vendue et il a fini sa carrière chez Bridel à Retiers.

                                                                  Renée Thouanel-Drouillas

 

Sources : Rencontre avec Monsieur Adeux par l’intermédiaire de Juliette Soulabaille.

 Pour m'écrire 35memoiredeguerre@gmail.com

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